Napoléon 1er, Empereur

 

Le XIXe siècle est un siècle charnière pour la Corse qui ne connait aucune guerre sur son sol. On peut parler de bouleversements. L’influence italienne est gommée. Des écoles sont créées. Les moyens de transport font un bond prodigieux et les ports principaux sont mis en état. Le tourisme ne tarde pas à suivre la même voie. Un embryon d’industrialisation nait à Bastia. L’émigration coloniale et le banditisme prennent également leur essor.

 

1800 / mars / Des Corses émigrés font le siège de Sartène

Ils veulent établir une régence avec l’aide du Tsar de Russie Paul 1er qui les arme en ce sens ! En effet les Russes sont de plus en plus présents en Méditerranée. Ils aimeraient pouvoir utiliser les ports de l’île et sont les alliés de la Grande-Bretagne contre la France. Le siège de Sartène échoue. Napoléon se rapproche alors du Tsar et lui propose Constantinople, l’Égypte devant revenir à la France. Le projet d’alliance franco-russe est en bonne voie lorsque survient en mars 1801, opportunément pour l’Angleterre, l’assassinat du Tsar commis par… un anglophile. 

 

1801 / Le Général Morand

▪ Morand (Charles Antoine Louis Alexis) est nommé en Corse après avoir fait toutes les campagnes de l’Empire, ce qui a fait de lui un guerrier efficace et sans pitié. Il y fait régner la terreur par des massacres et des pendaisons. Il est remplacé en 1811 par le Général Louis-César Berthier, réputé moins abrupt, mais en réalité de la même trempe. Morand quitte la Corse et tombe au combat en avril 1813. Berthier meurt défenestré dans des circonstances ambiguës en 1815.

▪ André François Miot revient pour administrer la Corse jusqu’en 1802.

▪ La Justice est rendue par un tribunal militaire extraordinaire afin d’endiguer les insurrections à répétition. La Corse a d’ailleurs été mise hors Constitution par Napoléon Bonaparte dès décembre 1800 à cette fin. 

1804 / 18 mai / Napoléon 1er est sacré premier Empereur des Français

Un Corse ayant eu pour modèle Pascal Paoli et fervent défenseur de la nation corse dans sa jeunesse, Napoléon 1er, devient le premier Empereur des Français. 

 

1805 / Napoléon 1er est roi d’Italie

Après les Campagnes d’Italie, Napoléon 1er en devient roi. Gênes fait donc désormais partie de l'Empire Français après cinq siècles d’occupation de la Corse, elle-même devenue française ! Incroyable retournement.

 

1807 / 5 février / Mort de Pascal Paoli

Mort de Pascal Paoli à Londres à l’âge de 82 ans. Théodore de Neuhoff et Pascal Paoli sont tous deux passés de vie à trépas dans cette capitale.

Epitaphe de Pascal Paoli, abbaye de Westminster

Photo © Estelle Fiette (2024)

 

1808 / Morand le féroce

Répression brutale dans le Fiumorbo orchestrée par Morand. Dix personnes exécutées, cent quatre-vingt-quatre déportées.

 

1808 / 20 avril/ Naissance de Napoléon III

Naissance de Charles Louis Napoléon Bonaparte, dit Louis-Napoléon Bonaparte, futur Président de la République (1848-1852) puis Empereur des Français (1852-1870). Mort le 9 janvier 1873 à Chislehurst (près de Londres) au Royaume-Uni.

1810 / 22 avril / Les mariés de l’empereur

Le premier avril 1810, Napoléon épouse en secondes noces Marie-Louise, archiduchesse d’Autriche. Pour associer le peuple à sa joie, il organise 6000 mariages entre des vétérans de ses Armées et des jeunes filles « pauvres et vertueuses » de leurs communes d’origine. Une dot est alors versée par l’empire. En Corse, sont ainsi célébrés 65 unions dont 41 dans le Golo (Centre-Corse).

 

1811 / La Corse devient un département français

Napoléon 1er fait d’Ajaccio la capitale de la Corse en lieu et place de Bastia.

 

1811 / Vaccination collective contre la variole

Napoléon Bonaparte ordonne la vaccination collective contre la variole par la méthode de la vaccine. Une des plus importantes décisions de l’empereur des Français, pourtant largement sous-évaluée historiquement. Le chirurgien en chef de l’hôpital militaire d’Ajaccio, Jean-Sébastien Vaume, en avait été antérieurement chargé en Corse dès 1774 par Louis XVI qui avait lancé une campagne sanitaire de lutte contre cette terrible maladie suivant les découvertes et nouveaux procédés d’inoculation de l’Anglais Edward Jenner.

 

1812 / Ouverture complète de la route Ajaccio – Corte

Première voie moderne plus ou moins sécurisée. Elle n’est totalement exploitable qu’en 1827. Le pont du Vecchio, ouvrage d’art important, n’est édifié qu’en 1825.

 

1814 / 11 avril / Abdication de Napoléon 1er

▪ Napoléon 1er est cantonné sur l’Ile d’Elbe, à quelques encâblures de la Corse. Île qui lui a été donnée en principauté séparée dont il a toute jouissance, avec un revenu de deux millions de Francs, trois bataillons de militaires et cent-cinquante marins sur cinq goélettes. Peu de temps après l’arrivée sur l’Île d’Elbe de l’empereur déchu, un individu appréhendé avoue avoir été payé pour l’assassiner. Le commanditaire principal de cette tentative d’assassinat reste inconnu…

▪ Retour des Bourbons et avènement de la Restauration. Louis XVIII, frère de Louis XVI, monte sur le trône le 6 avril 1814. La Corse reste misérable avec un enseignement, un commerce, une industrie et une agriculture anémiques. L’usage de la langue française est peu répandu, l’italien étant prédominant. En Corse, ce n’est qu’en 1824 que seul le français devient la langue officielle.

▪ Début avril 1814, la marine anglaise hisse son drapeau sur le sol corse, à la demande de quelques notables îliens. Drapeau vite retiré fin avril car, selon les ordres reçus, la Corse doit rester à la France.

 

1815 / 1 mars / Napoléon 1er s’échappe de l’Ile d’Elbe

À bord du brick « L’Inconstant », commandé par deux Corses, en direction des côtes de France. Napoléon s’est toujours entouré de Corses de confiance, tels Saliceti son envoyé secret.

 

1815 / 18 juin / Waterloo

▪ Épisode des « Cent Jours » durant lesquels Napoléon 1er reprend le pouvoir.

Défaite de l’Armée française à Waterloo (Belgique). Dix mille morts, trente mille blessés. Napoléon 1er abdique une deuxième fois le 22 juin 1815. Cette fois, direction l’Île volcanique britannique de Sainte-Hélène dans l’océan Atlantique sud, à 1900 kilomètres des côtes de la Namibie. Il y vivra six ans avant d’y mourir dans des conditions qui interpellent.

▪ Louis XVIII revient à la tête du pays le 8 juillet 1815.

 

1816 / 23 mai / Massacre de Bône (Algérie)

Les corailleurs corses sont considérés comme sujets britanniques par le Dey de Constantine, car ils sont alors représentés pour leur activité commerciale en Algérie par le vice-consul anglais de Bône. Les Algériens massacrent alors environ quarante corailleurs corses, principalement ajacciens, victimes collatérales du conflit diplomatique opposant l’Angleterre et l’Algérie. Les corailleurs anglais, quant à eux, perdent cent hommes et huit cents autres sont faits esclaves. Une expédition anglaise, forte de nombreux vaisseaux de guerre, fera plier Alger (environ 2500 morts algérois, 800 côté anglais). 1200 esclaves de religion chrétienne sont libérés par les Anglais. Après ce drame, l’exploitation du corail en Méditerranée par les Français est largement diminuée. Ils sont remplacés par les Italiens.

 

1820 / Bandits Corses

Constant, commissaire spécial de police en Corse (1816-1818) écrit dans son rapport (Bulletin de la Société des Sciences. N° 457-460) : « Ce qui trouble la Corse, ce qui y entretient un foyer d’alarmes et d’insurrection, c’est l’impunité des crimes, c’est l’audace des brigands, c’est la mauvaise composition des tribunaux, c’est l’affaiblissement progressif de la considération envers les chefs, par suite de leur peu de pouvoirs et de leur peu d’accord, c’est l’attitude armée de toute la population (car aujourd’hui nul ne sort sans armes), c’est la mauvaise composition des maires en grande partie premiers protecteurs et receleurs des brigands ». Amère constat…

De 1820 à 1823, trente-et-un gendarmes sont abattus par des bandits qui sont au nombre de cent-cinquante environ et qui se réfugient principalement en forêt. Cent assassinats par an en moyenne en Corse, soit trente-et-une fois plus que sur le plan national ! Ils sèment la terreur auprès d’une population qui n’a souvent pas d’autre choix que d’obtempérer à leurs demandes. Théodore Poli, déserteur, tente de les fédérer plus ou moins politiquement à travers sa « Constitution d’Aïtone », sans réel succès. Il est tué en 1827 par les forces de l’ordre. La Gendarmerie réagit avec son bataillon de « Voltigeurs » recruté parmi les Corses dès 1822. Elle les pourchasse en employant toutes les méthodes, même celles peu avouables. Très efficace. Les « Voltigeurs » stopperont leur action en 1850. En 1848, 228 assassinats étaient encore perpétrés en Corse !

 

1821 / La langue française commence à être imposée

Le recteur d’académie Antoine-Félix Mourre est chargé de la faire appliquer dans tous les domaines, l’école en premier. Elle progresse dès lors et remplace l’italien qui est la langue usuelle en Corse. En 1824, le français devient la langue officielle et unique. L’italien est enseigné dans les lycées de l’Île comme « langue étrangère » dès 1844. En 1881, le français devient la seule langue utilisée à l’école.

Il en va ainsi également pour d’autres territoires de France où la francisation linguistique est appliquée de la même façon, plus ou moins « durement » en fonction des régions. En ces temps, il était considéré que l’unité de la nation française en dépendait grandement.

Les liens entre les Corses et l’Italie restent néanmoins très forts, notamment avec la Toscane.

 

1821 / 5 mai / Mort de Napoléon 1er

Mort de Napoléon 1er sur l’île de Sainte-Hélène. L’évènement n’est connu en Corse que deux mois plus tard.

 

1827 / Achèvement de la route Bastia – Ajaccio

Par extension de la piste reliant Ajaccio à Corte, datant de 1812.

 

1830 / 5 juillet / Prise d’Alger

Ce fait militaire et politique réchauffe le cœur des Corses qui y voient des débouchés immédiats, les îliens ayant toujours eu des liens plus ou moins étroits avec l’Algérie. Les pêcheurs et corailleurs corses ne sont ainsi plus en conflit ouvert avec les marins et commerçants du Maghreb proche (sous domination de l’empire ottoman). L’espoir renaît concernant une éventuelle indemnisation du massacre de Bône, Algérie, en 1816 (voir plus haut). De nombreux Corses sont des acteurs directs de cette première partie de la colonisation de l’Afrique du Nord par la France. Charles X est encore au pouvoir pour trois semaines avant l’avènement de Louis-Philippe 1er.

Lors de la guerre d’indépendance de l’Algérie (1954-1962), 100.000 Corses y résident.